RENOUER LE DIALOGUE ET REPRENDRE EN MAIN LA TRANSITION AU MALI
Dans la nuit 18 au 19 août 2020, deux ans après sa réélection pour un second mandat, Ibrahim
Boubacar Keita annonce sa démission, celle du gouvernement et la dissolution de l’Assemblée
nationale. Pendant plusieurs mois le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces
patriotiques (M5-RFP), un regroupement hétéroclite de partis politiques et d’organisations de la
société civile, réclamait son départ. C’est finalement un groupe d’officiers de l’armée malienne
qui viendra parachever la fin d’un pouvoir à bout de souffle.
La mise en place de la transition a suscité un grand espoir au sein d’une frange importante de
la population malienne, lasse d’une décennie de crise sur fond de propagation de l’insécurité et
de massacres répétés de civils. Cet espoir renouvelé qui s’est accompagné de nouveaux choix
notamment en termes de partenaire stratégique, les changements restent jusqu’ici limités. Au
plan interne, depuis l’installation de la transition, il y a un très fort attentisme d’une partie des
Maliens vis-à-vis des autorités de la transition qui ont bénéficié d’un soutien populaire depuis
la mi-janvier 2022. En dehors du consensus collectif sur la question du soutien à la transition, le
contexte socio-politique malien actuel se caractérise par une réduction de l’espace civique sur
fond d’arrestations, perçue comme une stratégie visant à bâillonner toute voix tentée de tenir
des propos contradictoires à la position défendue par les autorités de transition. Les frustrations
sont ravalées par la peur : non seulement celle de l’autoritarisme direct, mais aussi celle d’être
mal jugé par ce consensus collectif.